Bouboule, Le Manchot, La Douleur, Roger-perd-son-froc et La Tenaille…

 

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Cinq petits artisans de la cambriole montent un coup fumant dans une villa de la haute. L’un d’entre eux tombe. Qui l’a donné ? Et quel sera le prochain ? Si l’intrigue n’en est ni mieux ni moins bien ficelée qu’une honnête Série noire de haute époque, le second roman de Robert Giraud (après La route mauve et avant La coupure) vaut surtout pour sa poésie et la restitution incroyablement juste d’un Paris populaire aujourd’hui totalement disparu (on peine à imaginer la rue Mouffetard, par exemple, comme « le refuge de petites gens aux situations précaires, quand elles n’étaient pas inavouables » !) Nul Limougeaud, en effet, ne connut mieux le Paris d’après-guerre que « Bob » Giraud, nonchalant écumeur de bistrots, grand-prêtre de l’argot et ami de Doisneau, avec lequel il composa Le vin des rues, l’un des livres les plus inoubliables sur sa ville d’élection, ses troquets, ses cloches et ses biffins, ce « peuple des berges » dont il ne cessera plus de torcher tendrement le portrait jusqu’à sa mort en 1997. Initialement paru chez Denoël en 1961 et aujourd’hui réédité avec bonheur par Le Dilettante avec une préface d’Olivier Bailly (auteur d’une biographie de Monsieur Bob), ce court roman n’a pas pris une ride, sinon celles qui font une patine aux bons livres, que traverse un vrai souffle et pas seulement l’air du temps. La petite brise qui passe à travers celui-ci porte avec elle une odeur de clope et de vinasse, la fumée d’un feu de trimards en bord de Seine, la note aigrelette d’un accordéon solitaire, un bout de chanson… tout ce qui chez d’autres aurait allure de décor et garde éternellement chez Giraud l’accent fraternel et un rien canaille de la vérité vraie.

Yann Fastier