Robinson, à la paresseuse…

 

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Employés dans une agence de voyage, Bonaventure et Dupoirier mettent au point un nouveau concept de séjour touristique où, moyennant 3000 F, l’on débarque le client sur une île déserte, à charge pour lui de se démerder. Chargé d’organiser le premier séjour, Bonaventure (Pierre Richard) et Petit Nono (Jacques Villeret) enchaînent les approximations auprès d’un groupe un rien gagné par le doute. On n’ose imaginer quelle pantalonnade aurait pu tirer d’un tel argument l’un ou l’autre de ces forçats du gag miteux dont le cinéma français des années 70 semble avoir détenu le secret. Mais c’est de Jacques Rozier qu’il s’agit, celui d’Adieu Philippine (1962), surfeur émérite d’une Nouvelle vague dont, pour en avoir semé la graine en son temps, il cueille ici la fleur avec la nonchalance étudiée du touriste du cinéma qu’il fut toujours un peu. Bien moins connu que les Godard-Truffaut-Varda-Demy-Rohmer, Jacques Rozier s’en moque, et son cinéma tout comme, qui passe en flânant le long d’un scénario suffisamment ouvert pour encourager l’improvisation d’acteurs en roue libre. Tous sont excellents. Pierre Richard, à peine décalé de ses rôles habituels de grand maladroit, fait un chef de troupe légèrement illuminé, presque inquiétant, parfois. Jacques Villeret, placide et méditatif, en devient presque beau lorsque la caméra s’attarde un peu à contre-jour, hésite et semble un peu distraite et douée d’une vie propre, actrice elle-même du film qu’elle tourne dans une très jolie confusion de l’art et de la vie que l’on pourrait tout simplement nommer poésie.

Yann Fastier