On a généralement tort d’appréhender l’islam comme une religion monolithique.

 

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Bien au contraire, dès le départ, cette religion sans église a toujours pullulé de schismes et de sectes plus ou moins compatibles, parant de rameaux supplémentaires et parfois déviants ses deux branches principales que sont le sunnisme et le chiisme. Aussi Chawki Amari aurait-il tort de se gêner pour en inventer de nouvelles, au premier rang desquelles les Zahiroune, adorateurs du Hasard, ne laissent pas d’inquiéter le Directeur des Sectes au Ministère de l’Intérieur algérien. Car le hasard fait parfois trop bien les choses : la preuve, c’est en s’en remettant à lui que Balak – dont le nom signifie à la fois « peut-être » et « attention » – a fait la connaissance de Lydia. Son charme opère, tout d’intelligence et de nonchalance apparente, mais son amour est-il sincère quand il semble avant tout servir les plans révolutionnaires de son maître Grand Zahir ?

Sous de faux airs de polar métaphysique et borgésien, Balak met d’abord en scène une Alger plus mystérieuse que lumineuse, crépusculaire et hantée d’agents doubles, tel ce Suiveur par vocation, caché derrière chaque arbre ou presque (« En fait, il adore les arbres. S’ils pouvaient marcher, il les suivrait certainement. ») Les amateurs de suspense, toutefois, trouveront peut-être qu’il ne tient pas ses promesses, un amour apaisé lui tenant lieu de seule apothéose au terme d’une promenade wikipédestre autour de la notion de hasard, qui semble avant tout soucieuse de n’en oublier aucun aspect au fil des conversations de ces jeunes érudits. Assaisonné d’affolants paradoxes quantiques, cet étalage n’est cependant pas trop indigeste et prend même une coloration politique quand on connaît le parcours de Chawki Amari, journaliste et caricaturiste contestataire, plusieurs fois condamné par un pouvoir algérien plutôt ami du hasard quand il s’agit de répression tous azimut.

Yann Fastier