Le narrateur, né en 1962, rapatrié d’Algérie peu après sa naissance avec ses parents,

 

Sécurité. Pour accéder au portail de votre bibliothèque, merci de confirmer que vous n'êtes pas un robot en cliquant ici.

raconte ses premières années et son adolescence dans la France effervescente des 60’s et 70’s, à Saint-Etienne. Pas facile de se (re)mettre dans la peau du petit garçon qu’on a été, de (re)trouver ses pensées et ses mots, sans tomber dans l’angélisme. Chomarat s’acquitte du défi avec délicatesse et sans céder à la facilité de l’auto-apitoiement ou du narcissisme. Certes, l’histoire qu’il nous conte est terriblement personnelle et il semble posséder une mémoire d’une belle faculté quand il décrit cette vie (pas) si simple. « Mes parents, j’avais l’impression de les connaître comme si je les avais faits. Cette jeune femme très Nouvelle Vague, cinquante de tour de taille, des dents blanches et bien alignées, grande douceur un peu triste, c’était ma maman. L’autre, si grand que la plupart du temps je ne savais pas trop à quoi il ressemblait là-haut, une voix qui descendait d’entre les nuages, c’était le professeur. Mon papa. » Sans oublier son petit frère un rien intrus, tellement brillant qu’à côté il paraît simplement normal. Ses 150 de QI pourtant auraient dû impressionner son paternel, mais à cette époque révolue où les enfants sont censés obéir, rentrer dans le moule et ne pas causer d’ennui, l’intelligence vive du rejeton n’a que peu d’importance. Intelligent d’accord, encore faudrait-il qu’il s’applique à tirer quelque chose de ce don du ciel, alors que faire ses devoirs, lire tous les livres et dire bonjour à la dame ne sont pas des activités où le dit surdoué excelle. Lui préfère essayer de comprendre comment fonctionnent les filles, dont sa cousine Lina, jouer aux voitures, aux circuits Scalextric et surtout au foot, même si personne ne le prend jamais dans l’équipe, avec ses deux pieds gauches. A sa place ni en classe ni à la maison, toujours un brin dans la lune, à côté, ses travers ne font qu’augmenter avec l’adolescence. L’enfant prend du recul, s’amuse des mœurs de ses congénères, s’angoisse de son inaptitude à intégrer le groupe et à séduire les filles, toujours elles. La peinture de l’époque, avec ses feuilletons télé, ses modèles d’auto disparus rappellera des souvenirs à ceux qui l’ont vécue et feront sourire les autres. Les interrogations du môme (« Pourquoi suis-je obligé d’aller au catéchisme alors que d’autres, non ? « ) prennent des dimensions métaphysiques au fil de ses apprentissages (« Dieu existe-t-il ? »). Les hontes, les gaffes, les inquiétudes de cet être en devenir parleront à tous, sous la plume d’un chomarat toujours drôle, mais plus tendre qu’à l’accoutumée.

Marianne Peyronnet