Zoé, étudiante en art à New-York, se voit proposer l’opportunité d’une année d’étude à Berlin.

 

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Zoé est fragile. Sa meilleure amie, Ivy, a été assassinée de quatorze coups de couteaux et son meurtrier n’a pas été retrouvé. Zoé est perdue. Depuis l’enterrement, elle sort avec Jesse, le compagnon d’Ivy. Ensemble, ils pleurent la disparue, mais cette relation n’est guère réconfortante tant elle charrie de culpabilité. Dans ce contexte, partir semble salutaire. D’autant qu’elle sera accompagnée d’Hailey, flamboyante rousse dégourdie. Sur place, elles partagent le luxueux appartement de Beatrice, autrice de thrillers à succès, partie en résidence se concentrer sur l’écriture de son prochain roman.

Berlin, ville tentaculaire, permissive, libertaire. Berlin, dangereuse, sans limite, excessive. Par cette immersion des deux copines dans la capitale inconnue, Calla Hankel fait se juxtaposer l’exploration de leur nouvel environnement et la connaissance qu’elles approfondissent l’une de l’autre. Toxic Berlin est un roman sur l’ambiguïté. L’intrigue principale, qui décrit la succession d’épisodes étranges où les deux colocataires se rendent compte qu’elles sont surveillées de l’intérieur dans ce logement qui dévoile des secrets, se pose en reflet d’une trame plus vaste, explorant les thèmes des faux-semblants, des masques. Zoé est à un âge et à un moment de sa vie où elle se cherche. Elle est en perte de repères dans ce Berlin labyrinthique. Elle ne parle pas la langue et aucun cadre ne s’impose à elle. L’exil donne lieu au lâcher prise, à l’expérimentation - de drogues notamment, qui la questionne sur son identité profonde, son orientation sexuelle. Et tandis qu’elle progresse dans la compréhension de son moi intime, Hailey se fait de plus en plus mystérieuse.

Henkel use avec finesse de tous les stratagèmes pour accentuer le sentiment de perplexité du lecteur. Et finir en apothéose ce récit envoutant sur l’équivoque. Miroirs, déguisements, au propre comme au figuré sont le décor de son histoire où les fêtes grandioses permettent aux participants de devenir autre, de se travestir, se métamorphoser le temps d’une nuit. Sait-on jamais qui on est vraiment ? Connaît-on réellement les personnes avec qui on vit ? Qui sont les copies ? Les originaux ? La vie rêvée, nocturne est–elle la vraie vie ? Faut-il se réveiller, affronter ses fantômes et les lendemains douloureux pour grandir ? Ou se laisser glisser, allègrement, dans l’exubérance, la folie ?

Marianne Peyronnet