Les super-héros sont fatigués. Quand ils ne sont pas morts : exit Superman, Batman et la famille Marvel !

 

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Le Capitaine Mantra est à l’asile depuis que sa sœur s’est fait écrabouiller par un train. Seul reste Indigo, le plus puissant d’entre eux. Et encore, personne ne l’a vu depuis huit ans, durant lesquels David Brinkley aura mené sa petite vie de journaliste, s’empâtant doucement avec femme et enfants dans une petite ville de la banlieue new-yorkaise. Ses super-pouvoirs vont s’affaiblissant, il ne vole plus aussi bien qu’avant et, d’ailleurs, en a-t-il encore envie, vraiment ? Mais voilà qu’une sombre machination, ourdie par ses pires ennemis, vient le tirer de sa retraite. Sera-t-il encore à la hauteur ?

Paru sans grand succès dans les années 70, Super Normal s’est cependant rapidement hissé au rang de roman culte, au point d’être identifié comme la principale source de la vague « déconstructionniste » qui devait toucher les comics de super héros dans les années 80, des Watchmen d’Alan Moore au Dark knight returns de Frank Miller. Le ton est ici beaucoup plus léger, d’une ironie constante envers un personnage plus préoccupé de sa libido que de sauver une planète qui, finalement, s’accommodait assez bien de son absence. Et c’est ainsi que sous la parodie, truffée d’allusions volontiers badines à la culture et à la politique du temps (au point de nécessiter un copieux appareil de notes), pointe une mélancolie qui ne doit rien à Stan Lee. Car si tous les ingrédients sont bel et bien là, jusqu’au final cosmique de rigueur, le principal ennemi d’Indigo n’est pas l’indestructible « Caoutchouc » O’Toole, le cruel Demoniac ni même Pxyzsyzygy, le tout puissant lutin de l’espace, mais avant tout lui-même. Ayant vaincu tous ses ennemis, il lui faudra encore se résoudre à liquider ses rêves de toute puissance adolescente et s’accepter tel qu’il est : un mortel comme les autres, en route vers la vieillesse et la mort. A l’heure des choix existentiels, le véritable héroïsme est peut-être tout simplement là.

Légèrement survendu par deux préfaces successives un peu trop dithyrambiques, Super Normal reste cependant assez drôle et attachant pour justifier cette réédition par les Forges de Vulcain, dont la vision gamma n’aura toutefois pas suffi à venir à bout d’un nombre tout de même un peu embarrassant de super-coquilles.

 

Yann Fastier