La Convention thermidorienne et le Directoire furent durs au petit peuple.

 

Sécurité. Pour accéder au portail de votre bibliothèque, merci de confirmer que vous n'êtes pas un robot en cliquant ici.

Le gouvernement réactionnaire entendait lui faire payer la Terreur, dont elle le rendait responsable. La suppression du maximum sur les denrées, de mauvaises récoltes et la rudesse des hivers achevèrent de faire de ces toutes dernières années du XVIIIe siècle une période dont on peine à mesurer la noirceur. On la mesurera toutefois un peu mieux à la lecture de ce livre stupéfiant. Le dossier D4 U1 7 du fonds de la justice de paix de Paris répertorie de façon très précise les cas de mort violente rapportés à la Basse-Geôle de la Seine entre le 1er floréal an III (20 avril 1795) et le 26 fructidor an IX (13 septembre 1801). L’épluchant sous tous ses aspects avec une érudite acuité, l’historien britannique Richard Cobb en tire un tableau saisissant de la façon dont on vivait et mourait en ces temps troublés. Du simple inventaire des poches des noyés, accidentés et assassinés, naissent autant d’histoires singulières, en marge de celle dont sont faits les manuels. Nulle vie n’est si minuscule qu’elle doive être passée sous silence et « les suicidés et les suicidées, (…) n’en sont pas moins, à leur manière, par le triste étalage de leurs échecs, des chroniqueurs muets de leur époque. » Si le contenu de ce petit livre est bien entendu trop riche pour être détaillé ici, il faut surtout souligner l’extraordinaire sentiment d’empathie qui s’en dégage et qui en fait, nonobstant sa rigueur, une œuvre éminemment littéraire. Car Richard Cobb (1917-1996), avant d’être un historien respecté, fut d’abord et avant tout un être humain, amoureux fou de la France et de la vie, dont il voulut personnellement  connaître les recoins les moins reluisants avec la même tendresse, le même respect qu’y mit un Robert « Bob » Giraud, par exemple, aux côtés duquel on n’hésitera pas une seconde à le ranger.

Yann Fastier