Il y avait le Dictionnaire des idées reçues de Flaubert et l’Exégèse des lieux communs de Léon Bloy, il y aura désormais Sympa d’Alain Schifres.

 

Sécurité. Pour accéder au portail de votre bibliothèque, merci de confirmer que vous n'êtes pas un robot en cliquant ici.

Il était temps : en matière de clichés, une mise à jour régulière est obligatoire. Sans doute y en eut-il entretemps, mais rarement d’aussi drôles. Car Alain Schifres a la canine souriante et s’il aime mordre, en bon critique gastronomique, c’est d’abord dans un bon boudin aux châtaignes, ensuite seulement dans le gras d’une époque qui fait décidément tout pour l’agacer. Mais il a le bon goût de déchiqueter l’ennemi avec humour et sans humeur, loin de certains pamphlétaires bilieux, petits détaillants d’aphorismes ou contempteurs de métier dont on taira le nom parce qu’on ne s’en souvient pas. Tout y passe : le chômage, que l’on résorbe, le motard en colère, la Française (mais comment fait-elle ?), la réforme en général et le grand chassé-croisé des vacances, ces marronniers que l’on n’abat jamais autant que les grands chênes et qui, les abat-on, repoussent de toutes façons dans la terre meuble du sympa comme les cheveux sur la tête à Samson, avec la même alerte vigueur de ce que décidément rien n’atteint. La plasticité : tel est le secret de la période molle où, d’amuse-bouche en fin de vie, l’on euphémise à plein chapelets, où l’on détox, où l’on run où l’on se comporte au lieu de vivre, où l’on ne dit plus les choses, on les sourit. Vous souvenez-vous des Mini-chroniques de René Goscinny ? Il y a de ce Goscinny-là chez Alain Schifres, du style et de la pointe et du sourire en coin mais qui fait mouche. Et qui, mine de rien, nous venge un peu de tous ces horripilants « belle journée » que l’on nous souhaite en ce moment. Et ça, c’est sympa.

Yann Fastier