Basées à Marseille, les éditions du typhon proposent depuis 2018 des textes exigeants, pépites oubliées ou manuscrits contemporains inclassables, servis par une maquette classieuse et soignée.

 

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Pour s’en convaincre, il suffit de se plonger dans la lecture de ces deux romans imparables de John Wain (1925-1994), parus initialement en Angleterre en 53 et 62.

Dans Hurry on down, Wain s’attache à décrire les mésaventures de Charles Lumley, diplômé en Histoire, qui s’écarte de la route rectiligne, faite d’ennui et de conformité, que d’autres avaient tracée pour lui. Il sera laveur de carreaux, dealer, chauffeur, préférant une vie sur le fil mais jamais écrite à l’avance au confort d’un destin préétabli.

Dans Et frappe le père à mort, Jeremy Coleman ne s’intéresse à rien d’autre que le piano. Orphelin de mère, élevé par un père prof de lettres classiques qui place l’effort et le travail au-dessus de tout, et par une tante bigote et effacée, il décide, à la suite d’une ultime dispute avec son paternel, de lui aussi tailler la route. La seconde guerre mondiale fait rage, Londres est bombardée, ses habitants souffrent du rationnement, qu’importe, c’est là qu’il lui faut être, car il a découvert le jazz et se fait pianiste dans les clubs.

Ces deux textes portent en eux la rage de la jeunesse, tels des prémices d’œuvres à venir marquées au fer du Live fast and die young. Incarnations de ces angry young men, mouvement littéraire britannique des 50’s, dont l’auteur est une figure majeure, Charles et Jeremy sont des rebelles sans cause qui se jettent dans l’existence avec la seule envie furieuse de vivre plus. Sublimés par un réalisme sans concession et une langue sans fioritures, Hurry on down et Et frappe le père à mort sont aussi des romans initiatiques dans lesquels les deux héros grandissent au gré des rencontres et des expériences. Charles se fond dans des milieux qu’il n’aurait pas dû connaître, Jeremy est confronté au racisme à travers Percy, musicien jazz américain, dont il devient l’ami. Ils progressent et changent parce qu’ils se frottent au monde. Créés à une époque où le concept « d’adolescence » commence à peine à exister, ils incarnent déjà à la perfection ces images de jeunes éperdus de liberté que la littérature et le cinéma ne tarderont pas à décliner à l’envi.

Marianne Peyronnet