Promoteur des tout premiers Parcs Nationaux américains,
fondateur de la plus ancienne association écologique des États-Unis, unanimement célébré de l'autre côté de l'eau, John Muir fut un authentique amoureux de la nature, dans la grande tradition transcendantaliste qui accoucha d'un Henry David Thoreau. Né en 1838 en Écosse, émigré très jeune dans le Wisconsin avec ses parents, il étudie comme il peut mais avec ardeur et se passionne pour les sciences naturelles et la botanique. En 1869, ayant l'occasion d'accompagner la transhumance d'un troupeau de moutons dans les montagne qui dominent la Yosemite Valley, en Californie, il passe un été de rêve qui le marquera à jamais et déterminera tout le reste de sa vie, désormais consacrée à la défense d'une nature sauvage, qu'il devine déjà menacée par le tourisme et l'industrialisation. Si l'on peut être agacé, parfois, par l'exultation systématique dont il est saisi devant chaque paysage, l'on n'en sera pas moins indulgent eu égard à la complète sincérité d'un véritable amoureux de la nature, aussi attentif à la moindre fleurette qu'au plus orgueilleux séquoia, toute faculté d'émerveillement immédiatement disponible pour le moindre petit miracle, pourvu qu'il soit de la nature. Sans compter que, chose assez rare pour un auteur d'un siècle où l'amour de la nature se résumait souvent assez vite à lui tirer dessus, le fanatique de la gâchette ne prend jamais le pas sur l'ami des animaux. John Muir ne chasse pas et n'aime pas ça. On le verrait même assez bien préférer sans trop l'avouer les ours et les loups aux moutons qu'il convoie. Seule ombre au tableau, le jugement qu'il porte sur les Amérindiens qu'il croise, entaché de préjugés et d'autant moins amène qu'il les connaît mal et que ceux qu'il rencontre, spécimens californiens déjà bien attaqués par l'alcool et la démoralisation, sont effectivement assez loin du « bel Indien » des Plaines cher à John Ford...
Yann Fastier