Pour mettre de l’ambiance et pimenter les repas de famille, regardez ce film et posez-le sur la table.
Car s’il est un domaine où chacun voit midi à sa portière, c’est bien la bagnole.
Coline Serreau a posé sa caméra dans les stages de récupération de points (certainement l’un des derniers lieux de vraie mixité sociale, soit-dit en passant) et attrape au vol les clichés qui ne manquent pas de fuser de la part d’automobilistes frustrés dans leur volonté de puissance : « moi, je sais conduire, le danger, c’est les autres », « le permis à points, c’est juste une pompe à fric », « les femmes ont peut-être moins d’accidents, mais elles les provoquent », « moi, l’alcool, je gère »… L’un après l’autre, tous seront épinglés, analysés… et réfutés, y compris le fameux contre-exemple allemand des autoroutes à vitesse illimitée, financées par les constructeurs automobiles qui s’emploient à soigneusement dissimuler les véritables statistiques de mortalité de ces tronçons où prévaut la loi du cylindre. Par-delà l’aspect strictement pédagogique de son documentaire (il faudrait être sévèrement borné pour ne pas réfléchir à sa propre conduite après l’avoir vu), c’est également – et peut-être surtout – l’humanité elle-même que Coline Serreau donne à voir, dans toute sa forfanterie, parfois, mais aussi sa drôlerie et sa fragilité. Se défendant de juger qui que ce soit, à l’instar des très psychologues animateurs de ces stages, elle se contente de placer chacun devant ses contradictions et devant l’énorme responsabilité dont on le charge en l’autorisant à déplacer plus d’une tonne de ferraille à des vitesses considérables.
Yann Fastier