Comment être punk au Maroc de nos jours ?

 

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Cette question est un des fils conducteurs du film « Dima Punk » dans lequel la réalisatrice a suivi pendant 10 ans le parcours d’un adolescent Stof, fan d’Exploited, dans un quartier populaire de Casablanca. Tout aurait pu être simple, qui n’a pas connu ça ? Une vie d’ado rythmée par la musique et les potes, des parents contrariés par un style vestimentaire extravagant et des sons qui dérangent. Mais pour Stof, c’est une autre galère: ici le dress code punk est mal vu, la crête encore moins et les concerts de rock rarissimes. Alors quand arrive l’unique festival de l’année, c’est avec une fébrilité presque palpable que Stof se prépare, passant des heures à peaufiner sa crête et les multiples détails de son look. Il nous entraîne dans son sillage, faisant surgir avec lui toute une jeunesse bigarrée crêpée et crêtée qui déboule sur un immense terrain vague de tous les orifices de la ville. C’est un des grands moments du film. La scène rock marocaine s’offre à voir et ça déchire ! Et c’est aussi la crête pointue de Stof qui domine et nous immerge au cœur du pogo. Elle nous baladera du début à la fin. Elle changera de couleur, de forme à mesure que l’univers de Stof se rétrécira, de concerts annulés en rassemblements interdits, jusqu’à ne plus devenir qu’un lointain souvenir après un regrettable séjour en prison. Mais une crête ça ne s’efface pas comme ça, Stof le sait bien qui reste, envers et contre tous, le dernier punk de sa ville. La réalisatrice, Dominique Caubet est une grande sociolinguiste spécialisée en arabe marocain. Avec ce premier film, outre le fait de mettre en exergue la crise que traverse  l’adolescent devenu homme tiraillé entre sa quête existentielle et son intégration au sein de la société, elle réussit à dresser le portrait d’un Maroc urbain méconnu qui ne demande, lui aussi, qu’à sortir de l’ombre. Ode au « Do It Yourself » et à la liberté capillaire, oscillant entre humour et désespoir « Dima punk » est un film pour les ados et pour ceux qui le sont restés…

Cécile Corsi