Alexis David-Marie est prof dans un collège du Val-de-Marne.
Tandis qu’il observe les comportements de ses élèves de 6ème, lui reviennent en mémoire des souvenirs de sa propre adolescence, agitée. Alors, dans ce récit, autant introspectif que réjouissant, il s’adresse au petit gars qu’il fut et dont il n’a oublié aucune des frasques. Ses écarts de conduite furent nombreux, lui qui fut expulsé après décision de conseils de discipline plusieurs fois au cours de sa scolarité. Impossible de le faire se tenir tranquille au grand dam de son père, psychiatre imposant et distant, ou de la nouvelle femme de celui-ci, sa mère s’étant suicidée quand il avait trois ans. Ce sont ses errements passés qui lui permettent de ne pas juger trop sévèrement les incartades des jeunes dont il a désormais la charge. Car ce n’était pas le manque d’amour, ou de lourds problèmes familiaux qui firent qu’il se changea en démon quasiment du jour au lendemain, mais bien un besoin d’exister et des hormones devenues folles. Victime de harcèlement à cause de sa taille, de sa drôle de silhouette et de ses dents de travers, affligé des surnoms de Ratboy ou Nunus, gagnant du concours du plus moche de sa classe en 5ème, sa réponse fut de se montrer le plus exubérant, le plus casse-cou, frondeur possible pour exprimer son désir de liberté. Les étiquettes qu’on lui colle, les cages dans lesquelles on l’enferme, Nunus les explose, au point de se mettre en danger. Cannabis, alcool, fugues, skate et musique sont ses échappatoires, avec les filles et les copains, et il en faut peu pour qu’il tourne mal.
Alexis, désormais enseignant, connaît bien les mécanismes pouvant mener à l’échec dans ce système scolaire, cette centrifugeuse prompte à éjecter certains élèves. Il sait le poids de la soumission, de la normalité aux esprits rebelles. Il se souvient à quel point les injonctions à correspondre à une image, à rentrer dans des cases peuvent être pesantes et destructrices. Il interroge l’adulte à l’aune de son parcours d’ado, se rappelle avec une clarté stupéfiante ses pensées d’alors, et livre, non sans humour, un joli retour sur son adolescence.
Marianne Peyronnet