« Comancheria » situe son action au Texas mais loin de la glorieuse Dallas et de ses hommes d’affaires en santiags.

 

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Alors bienvenue au pays du pétrole ? C’est l’histoire de deux frères, Toby et Tanner braqueurs de banque à la petite semaine et des deux policiers-rangers qui les traquent. Les premiers essaient d’amasser le plus d’argent possible pour sauver leur ranch familial et assurer l’avenir des enfants de Toby. Non-professionnels, ils font preuve cependant d’assez d’intelligence pour ne braquer que de petites banques dans de toutes petites villes. Un ranger bientôt à la retraite est chargé, pour sa dernière mission, de les arrêter avec l’aide de son fidèle collègue et ami. A mi-chemin entre le western et le film policier, « Comancheria » nous propose d’emblée une autre image du Texas. Celle des petites villes abandonnées où ne subsistent que le drugstore du coin et « La » banque. Celle-ci, symbole absolu du pouvoir du dollar sur la population, est le lieu de vie central de ces bourgades poussiéreuses écrasées par le soleil. C’est là, Ô ironie, que se crée le lien social, que les gens viennent pour échanger au sujet de leur unique préoccupation : leur survie. Comment sauver de maigres économies qui, impitoyablement, se transforment en dettes dans un éternel cercle vicieux qui fera dire à l’un des personnages : « Lorsque l’on naît pauvre, on reste pauvre de génération en génération » ? Pour briser ce cercle infernal, les deux frères prendront le parti de la violence et du vol, portés probablement par l’idée que la réussite sociale et financière ne peut se construire qu’au prix du sang. Le film illustre l’idée fondatrice, qu’il y aura toujours « quelque chose de pourri » au pays du pétrole. De fait, la croisade individualiste des frères, rythmée par des braquages de moins en moins réussis se transforme peu à peu en une course poursuite désespérée dont on pressent une issue fatale. Parallèlement nous suivons la filature des deux policiers lancés à leur trousse. Le puissant Jeff Bridges campe l’aîné, un ranger à la John Wayne, façon « Dernier des géants ». Un grand limier passionné par son métier et sommé  de prendre une retraite qui sonne pour lui comme un glas, annonçant de sombres années de solitude et d’ennui. Son plus jeune collègue lui voue une admiration telle qu’il s’attache même à porter le même uniforme que lui… Mignon… Ce genre de détail, en tout cas, révèle une amitié pudique et cependant indéfectible, nourrit par des heures d’attentes dans les motels miteux ou sur les routes cabossées de l’Ouest. L’essence du film se trouve là dans ces deux couples, miroirs l’un de l’autre même si plusieurs lectures du film s’offrent à nous. En effet, « Comancheria » est, à l’évidence, un polar de facture, somme toute, classique, mais il se révèle également être un film social dans sa dénonciation d’une certaine réalité, celle des déshérités  et autres laissés- pour-compte de l’Amérique. C’est également un western moderne dont il détient nombre de caractéristiques qui rappellent les grandes œuvres d’Hollywood de Géant avec James Dean jusqu’à No country for old men des frères Coen plus récemment. Et puis, pas de grand western sans sa ballade country réinventée ici par le ténébreux Nick Cave pour mieux magnifier ce thème des amitiés éternelles. Irrésistiblement la nostalgie finira par prendre le dessus sur l’action et nous pourrons finalement voir ce film comme une tendre ballade d’amour et d’espoir sur fond de violence ordinaire.

Cécile Corsi