Qu’il en délimite le contexte ici ou ailleurs, hier ou aujourd’hui, le narrateur des 18 savoureux textes courts réunis dans ce recueil donne à lire autant de vies, autant d’épisodes découpés en tranches marquées du sceau du rock’n’roll.
Et quelles aventures il nous narre, cet individu fictif qui peine à se dissimuler derrière son créateur, soit Patrice Léouffre, arpenteur infatigable de la France nocturne des concerts pour son mythique fanzine Rock Hardi ! Et s’il nous dit quelque chose, cet homme de l’ombre, c’est bien que le rock est multiple, atemporel et increvable, bref qu’il bouge encore. Que les histoires du présent ouvrage se déroulent dans une chambre, sur un parking ou au gré de l’asphalte, toutes s’amusent à la parodie des différents registres littéraires comme autant d’incarnations des divers sous-genres musicaux déployés sous la bannière générique du rock. Pastiche de roman noir avec détective privé bien à la ramasse, de récit de science-fiction avec extra-terrestre bien à la ramasse aussi ou encore de fable ésotérique écrite sous acide, chaque nouvelle surfe sur un album ou un morceau lui donnant sa tonalité. Johnny Cash, Leonard Cohen, les Fleshtones ou les Dogs (et j’en passe) sont conviés tour à tour dans des petits bouts de bravoure ou de bravade (c’est selon), sans que l’on sache si c’est l’écoute d’une chanson qui a soufflé à l’auteur l’idée du texte, ou bien l’inverse. Tout est possible. Surtout les surprises. Si l’auteur prend bien soin d’expliquer dans de brèves et poilantes préfaces l’itinéraire que va prendre le lecteur, ce dernier n’est pas au bout de ses découvertes et de ses émotions. Brouillant les pistes, surfant sur des airs tristes ou déchainé tel un beau diable sur des riffs d’enfer, Léouffre offre à son monde toute une palette de sensations dont il serait dommage de se priver. Bonne route !
Marianne Peyronnet