Jaxie a 16 ans. Il réagit parfois avec violence, alors ceux de son lycée le craignent et le rejettent.
Il se sent seul. Sa mère est morte. Son père le bat. Quand il retrouve son paternel écrasé sous son pick-up, bien qu’il ne soit en rien responsable de sa mort, il se dit que les flics verront en lui un assassin et le mettront en taule. Un fusil, des jumelles, quelques affaires, il s’enfuit.
Le bush australien est une terre hostile pour qui s’y aventure à pied et la cavale de Jaxie devient un calvaire que l’on suit pas à pas. Il lui faut se cacher, éviter tout rapprochement avec toute forme de civilisation, forcément hostile elle aussi. Il lui faut trouver de quoi boire et se nourrir. Heureusement il sait chasser et dépecer la viande des kangourous qu’il abat. Il lui faut avancer, au rythme de ses pensées, de ses souvenirs, de son envie d’aller retrouver Lee, sa cousine, avec qui il fera sa vie. De ses réflexions naît un personnage plus complexe qu’il n’y paraît. Le lecteur, obligé de se fier au seul point de vue du narrateur, s’immerge dans son monde intime à mesure que le fugueur s’éloigne de celui des hommes. Puis, au hasard de sa fuite apparaît une cabane, habitée. Dans ce grand nulle part accablé de chaleur, le père Fintan MacGillis, curé irlandais défroqué vit là dans la solitude, le dénuement le plus complet, depuis des années. Ils vont devoir s’apprivoiser.
La rencontre entre ces deux êtres qui se méfient l’un de l’autre transforme le récit. Le périple solitaire dans une nature écrasante prend des airs de roman initiatique pour un Jaxie qui amorce une mue affective au contact du vieux fou. D’un coup, l’environnement semble se rétrécir, se limiter aux abords de l’abri, tandis que de nouveaux sentiments submergent l’adolescent et que la relation humaine se mettant en place prend le pas sur le reste. Tout demeure lent dans ce coin du désert et pourtant Tim Winton parvient à captiver. Le partage d’un repas, quelques confidences, beaucoup de blancs et de silences… tout est prétexte à maintenir une terrible tension, qui ne s’éteindra que lors d’un ultime chapitre, remplacée alors par une émotion foudroyante.
Marianne Peyronnet