Sauro revient à Badiascarna, le petit village de Toscane où il a grandi.

 

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Il n’y est pas retourné depuis plus de vingt ans, depuis que son père l’a chassé quand il était ado. Il revient, à la demande de sa mère, justement pour rechercher son père qui a disparu. Ce retour est l’occasion de se souvenir de ses 13 ans et de raconter le drame qui l’a conduit à la rupture avec les siens.

Amerighi construit sa narration au gré de l’alternance entre des chapitres au passé, à l’époque de l’adolescence de Sauro, et au présent, dans la tête de son personnage principal tandis que sa maturité lui permet de porter un regard neuf sur des événements qu’il n’avait pu saisir lorsqu’il était jeune. Sauro n’a pas envie de retourner à Badiascarna. Il a construit sa vie ailleurs, contre. Il y a été heureux, pourtant. Avec ses potes, Momo, Le Docteur, et Trifo, ils avaient dans l’idée de former un groupe de rock et de devenir riches et célèbres. Leur amour pour Bowie ou les Stooges les portait. Dans l’abattoir de la ville, ils avaient installé leur salle de répét dans une chambre froide défectueuse. Ils se donnaient du mal pour être au point pour un premier concert déniché par Bea. Bea dont ils étaient tous amoureux. Sauf peut-être Trifo, qui l’aimait d’un amour différent, vu qu’il était différent lui-même, pas « débile », juste retardé mental.

Le temps qui reste est un roman mélancolique. Il dit le temps qui passe, les malentendus qui détruisent des vies, les erreurs qui rongent. Il dresse le portrait d’une bande de copains pris dans une tourmente qui se chargera de les éloigner mais qui seront unis, le temps d’un été, plus que des frères. On pense à Stand by Me, le film de Rob Reiner tiré de la nouvelle Le corps de Stephen King, incluse dans le recueil Différentes saisons. Les dialogues et les relations entre les membres du groupe, à cet âge où l’amitié est plus importante que tout, sonnent aussi juste.

Le temps qui reste n’est pas nostalgique d’un âge d’or qui serait révolu. Même si le présent n’a tenu aucune promesse, ce n’était pas mieux avant. Amerighi donne une dimension sociale à son récit qui empêche son histoire de se noyer dans un pathos facile. Badiascarna a vécu un renouveau économique grâce à l’implantation d’une centrale géothermique qui était censée apporter confort et prospérité aux habitants déshérités de ce coin du monde. Elle leur a surtout amené l’amiante et les cancers, qui tuent non seulement les ouvriers qui y travaillent mais aussi leurs femmes qui respirent les poussières quand elles nettoient les vêtements de leurs hommes.

Le lecteur apprendra les tenants d’une histoire bouleversante au fur et à mesure des révélations que Sauro découvrira lui-même. Comme le héros, il en sera ému durablement ému.

Marianne Peyronnet