Je suis d’ordinaire peu fan des biopics, surtout en BD, tant c’est très souvent opportuniste, convenu et moche.
Le soin apporté à cette histoire des Ramones prouve qu’il ne faut jamais avoir d’a priori. En prenant Dee Dee comme narrateur de l’épopée du groupe, les auteurs ont su éviter l’écueil d’un récit trop linéaire et distancié. Dee Dee raconte, son enfance passée dans les bases militaires américaines en Allemagne sous la coupe d’un père alcolo et violent, son arrivée à NY et sa rencontre avec ses « frères », ses addictions, jusqu’à l’ultime morsure de l’héroïne. Si toutes les anecdotes connues sont évoquées (les concerts au CBGB, le look, la célèbre photo du premier album…), elles sont portées par un point de vue particulier, mêlées aux souvenirs perso, aux réflexions du bassiste, et livrées selon un découpage dynamique faisant la part belle aux flashbacks. Ruptures de tons, cassures de rythmes… la lecture se déroule au tempo d’un morceau des Ramones, énergique, tendue… comme les relations au sein du groupe. Le dessin en noir et blanc d’Eric Cartier, crade comme une ruelle de NY dans les 70’s, colle à la crasse des salles de concerts miteuses, des chiottes où se faire une ligne, du métro dégueu, des crottes de chien, des cellules de dégrisement. Faut avouer que le rose bonbon aurait mal posé l’ambiance, pas franchement fun, de l’époque et des rapports entre les frangins Ramones. Bref, One Two Three Four… Ramones ! est une œuvre qui ne se fout pas de la gueule du monde. C’est un hommage sensible, extrêmement élégant aux pionniers du punk ricain, très documenté (j’ai appris plein de trucs), soutenu par une vraie vision, basé sur de véritables choix narratifs explicités d’ailleurs en fin de volume.
Marianne Peyronnet