Dernier volume en date des aventures de Max Zajack, Tout sauf Hollywood reprend la vie de l’alter ego de Safranko là où il l’avait laissée, c’est-à-dire à peu près nulle part, autant dire au même endroit.
Le misanthrope égocentré n’a pas tellement changé, et on en sait gré à son créateur, tant se replonger dans ses galères est un pur bonheur. Max, dans cet épisode, a simplement décidé que, pour accéder à la gloire littéraire qu’il mérite, puisqu’il faut bien gagner en notoriété, alors il fera acteur pour mieux être auteur. Décision qui fera naître chez lui de grands espoirs et d’immenses déceptions, tant il peut faire preuve d’une immaturité et d’une naïveté à la mesure de sa ténacité. Evidemment, on assiste hilare à son incapacité à intégrer cet univers. Castings ratés, séances de déshabillage, tournages de spots publicitaires débiles, les rares propositions qu’on lui fait ne sont pas à la hauteur de son talent et Max ne cesse de geindre, de grincer des dents, d’assassiner critiques et réalisateurs de ses apartés. Chacun en prend pour son grade, rien ni personne ne lui plaît. Max ne s’embarrasse pas de demi-mesure pour juger les crétins qui l’entourent et l’obligent, par leur manque de discernement à l’engager à prendre toutes sortes de boulots nuls, puisqu’il faut bien manger et ne pas avoir l’air de trop profiter des largesses de sa femme. Car Max s’est débarrassé de sa Putain d’Olivia, et la relation qu’il entretient avec Gayle est l’exacte opposée de celle qu’il vivait avec son ancienne maîtresse. Quelle femme admirable que cette Gayle ! Persuadée du talent d’écrivain de son homme, elle est un miracle de patience face aux (in)décisions de Max. Jusqu’à ce qu’elle décide de reprendre ses études et donc de déménager très loin, obligeant son amant à se trouver un autre pied à terre. Comme à son habitude, SaFranko laisse la part belle à Max, en un sens, puisqu’on ignore si la belle ne choisit pas l’exil pour s’éloigner de celui qu’elle aimait et qui a peut-être fini par la lasser. Le seul point de vue avancé reste celui de Max, plaçant le lecteur dans l’obligation de prendre pour argent comptant tout ce qu’il raconte. Et c’est ce qui fait qu’on aime tant les romans de Mark. La mauvaise foi, la mauvaise humeur du anti-héros loser qui a toujours d’excellentes explications à apporter sur le fait qu’il ne réussit pas, reportant le plus souvent la faute sur les autres, tous ces autres imbus d’eux-mêmes, incultes vulgaires qui méprisent son travail et déprécient son art. Comment l’en blâmer ? Les réflexions acides de Max sur le monde de l’édition et du cinéma, sur l’état de dégénérescence des cerveaux de ses compatriotes sont d’une telle justesse qu’on ne peut qu’adhérer, satisfait et le sourire aux lèvres de cette petite vengeance qu’il nous accorde. L’histoire finit dans un grand flou quant à l’avenir de Max, reflet de l’absurdité de la vie, la sienne, la nôtre, qui pousse aux concessions et aux bassesses, à accepter le quotidien avec résignation et son lot de tâches ingrates, sans qu’on ait pour autant ce génie, cette part de folie, qui font de SaFranko un immense écrivain.
Marianne Peyronnet