A Montcalme, village que l’on imagine du sud-ouest mais qui pourrait être n’importe où, les hommes sont les maîtres.

 

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Ils portent la culotte et les fusils. S’il le fallait, pour prouver leur force et leur raison d’être sur terre, ils rôdent et défendent. Dans leur comité de vigilance citoyenne, il y a le doc, l’instit, l’employé de mairie, le paysan. Tous blancs, virils, chasseurs évidemment, ils sillonnent les bois nocturnes, au cas où quelque bronzé forcément mal intentionné se risquerait dans le coin. D’ailleurs, il paraîtrait qu’un de ces basanés se permet de fouler leur territoire et vole leurs récoltes. Leur ronde effectuée, un petit verre au bistrot, et zou, retour chez bobonne, pour ceux qui ont su garder une chienne au chaud.

Blanche fait partie de ces femmes. Bonne épouse et mère, elle a vécu la peur au ventre, dans l’isolement et la crainte des coups. Enceinte à nouveau, c’en est trop. Epuisée, elle a décidé de rejoindre les anges, puisque même son fils n’en est pas un. Mais, plutôt qu’une martyre, elle deviendra la fauve.

Marre des Feel Good Books ? Bienvenue dans un Revenge novel des plus jubilatoires. Lors d’une unique nuit, dans une intrigue resserrée à l’extrême, au cours de laquelle tous les protagonistes finiront par se croiser, la tension monte par palier, explose, jusqu’à l’apaisement. Le lecteur ne perd pas de temps à savoir de quel côté il est et chaque action libératrice des opprimé(e)s est une victoire. Porté par un style inventif et efficace, La fauve n’est cependant pas qu’une course poursuite dans la forêt où les gros cons seront punis. Bien sûr, Yvan Robin y accable ses personnages masculins en les affublant de toutes les tares que l’on retrouve dans les faits divers et dans les commentaires lâchés sur les réseaux sociaux de notre fantastique modernité, mais il y aborde aussi des thèmes et dézingue des tabous rarement développés en littérature (qu’il serait dommage de dévoiler ici) et dresse des portraits sensibles et justes de femmes poussées à bout. Leur belle colère, la violence qui déferle jusqu’au paroxysme final est l’exact contrepoint de leur désir de vivre libres, en paix, dans un monde de douceur, de grâce et d’amour, soulagé des hommes ou du moins d’une masculinité toxique. Amen.

Marianne Peyronnet