Un homme se voit délivrer une licence de suicide, à consommer dans la semaine.

 

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Dilemme : il ne veut plus mourir. Un autre homme, porteur d’une licence de meurtre, en décidera pour lui.

S’il y a bien évidemment quelque chose de Kafka dans l’absurdité bureaucratique qui traverse cette histoire dominée par la présence écrasante du Palais de justice de Bruxelles, c’est plutôt dans les nouvelles de Borges, Cortazar ou Buzzati qu’il faut en chercher la véritable et labyrinthique inspiration. A la faveur d’une narration inquiète et sans cesse reprise au gré d’une temporalité éclatée (deux trames alternées qui finissent par se rejoindre), William Henne boucle la boucle en forme de corde de pendu, de manière aussi imparable que l’aurait fait l’un de ses maîtres en vertige, au nombre desquels il faut bien sûr ajouter le grand Winsor McCay, pour une mise en page ouvertement référentielle dans sa quasi-totalité. On en déduira aisément que William Henne n’est pas la moitié d’un âne et qu’il a beaucoup lu, mais pas seulement : on dira aussi qu’il est exemplaire de cette nouvelle génération d’auteurs de bande dessinée qui, au sein de divers collectifs (Amok, Fréon, La 5ème couche…), s’efforcent depuis une vingtaine d’années de renouer avec une littérature exigeante, aux limites de l’expérimentation, sans toutefois rien renier des spécificités de leur médium. Si, parfois, le résultat peut sembler un rien abscons ou même assez vain, il n’en est heureusement rien ici, où la recherche formelle ne perd jamais de vue la lisibilité du récit, pour donner finalement lieu au même genre d’innocent plaisir contemplatif que connaît tout amateur d’icosaèdres.

Yann Fastier