The siege of Trencher's farm, ou Les chiens de paille, est un roman écrit en 1969.

 

The siege of Trencher's farm, ou Les chiens de paille, est un roman écrit en 1969.

 

Livre

Les chiens de paille, de Gordon Williams

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Publié une première fois en 1972 par Les Presses de la cité, il ressort aujourd’hui chez Denoël dans une nouvelle traduction.

George Madruger est un universitaire américain. Il est sur le point de terminer un livre sur Banksheer, écrivain anglais qui semble être connu de lui seul, et il s’installe dans un coin paumé de la campagne britannique pour s’immerger dans l’ambiance bucolique et être au plus près des émotions ressenties par l’objet de son étude. Sa femme Louise, anglaise, et sa petite fille d’une dizaine d’années l’accompagnent. La maison qu’il loue est au milieu de nulle part, dans un bled isolé. Alors qu’une tempête de neige coupe les habitants de tout contact avec le monde, Henry Niles, un tueur d'enfants, s’échappe de l’hôpital psy tout proche, tandis que disparaît une gamine simplette lors d’une réunion entre villageois. Sur la route qui les ramène à leur ferme, George heurte Henry avec sa voiture et le conduit chez eux. Rapidement, cinq autochtones, persuadés que le fugitif a tué la gosse, décident de se rendre chez les Madruger pour lui faire la peau.

D’emblée, Gordon Williams distille les éléments d’un récit où la tension ne fera que croitre au fil des pages. Malgré leurs tentatives pour créer des liens avec la communauté, comme se rendre au pub ou participer à la fête du village, on fait comprendre aux Madruger qu’ils ne sont pas les bienvenus. Surtout George, ce ricain trop snob qui n’entend rien aux mœurs locales. L’atmosphère est pesante, les attentes déçues d’autant que les relations entre George et Louise ne sont pas au beau fixe. La neige ne fait que les éloigner un peu plus de la civilisation, reclus dans leur bâtisse devenue forteresse, subissant les assauts successifs de la horde de tarés imbibés d’alcool, ivres de rage, prêts à tout. Aucun temps mort dans ce texte parfaitement construit dont l’issue demeure imprévisible tout du long et qui n’a rien perdu de son efficacité.

Marianne Peyronnet

Film

 Les chiens de paille, Film de Sam Peckinpah

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Difficile de résister et de ne pas revoir pour l’occasion le film tiré du roman et découvrir ce qu’a fait Peckinpah de l’œuvre originale. Ici, le personnage principal, joué par Dustin Hoffman, se nomme David. Il incarne un mathématicien venu en Angleterre jouir du calme pour travailler dans le village natal de sa femme Amy. Elle connaît donc les gens du village, notamment la bande de gars qu’ils engagent pour réparer le toit de leur garage. Le couple, sans enfant, est heureux, amoureux, même si elle s’ennuie.

Le réalisateur prend plus de temps pour installer son histoire, et si la tension va crescendo, elle démarre plus tard et culmine dans la scène de l’attaque finale. Les enjeux, malgré de petites différences de scénario, sont les mêmes ; comment un homme, très isolé, se transforme en sauvage pour sauver la peau d’un étranger et finalement la sienne et celle sa femme. Ses convictions profondes, son pacifisme de démocrate assumé, sa lutte contre la peine de mort, sont ébranlées face à une animalité qu’il ne comprend pas. Les thèmes (Ricains contre rosbifs, étrangers contre autochtones, éduqués contre incultes, friqués contre crève la faim, intelligence contre bestialité) demeurent semblables et prennent corps de la même façon, à travers l’évolution de cet érudit obligé de se battre pour survivre, faisant fonctionner sa tête pour trouver des solutions pratiques quand les autres ont un fusil.

Le film est toujours d’une efficacité redoutable, porté par un Dustin Hoffman habité et si l’on peut noter que les deux œuvres fonctionnent toujours, c’est surtout dans la vision de la femme et du couple que l’on mesure le temps parcouru. Les deux héroïnes sont assez insupportables alors que l’on saisit parfaitement le désarroi et les réactions de George ou David. Si Williams épargne à sa Louise un viol dont Peckinpah s’empare dans une scène centrale du film, point de départ d’une violence libérée jusque-là contenue, les deux femmes partagent un désir difficile à assumer de nos jours, celui de fréquenter un homme, un vrai, avec des biscotos (pour le dire poliment), un qui n’hésite pas à employer la force pour se faire entendre, quitte à ce qu’elle se montre à leurs dépens. Incapables d’agir, posées là comme des boulets, hystériques, agressives, promptes à faire preuve de vilenie pour s’en tirer, il y a fort à parier qu’aucun auteur ou réalisateur ne les accablerait d’autant de tares aujourd’hui.

Restent deux œuvres puissantes, encore dérangeantes, qui posent la question de la légitime défense, de la masculinité toxique, de l’ultra violence, pour le coup malheureusement d’actualité.

Marianne Peyronnet