Bobby a été élevé sans père par une mère alcoolique qui lui a toujours caché l’identité de son géniteur.
Unique figure masculine dans son entourage, son grand-père a eu une grande influence sur le petit garçon qu’il était, lui inculquant notamment l’idée de la supériorité de la race blanche. Aussi, quand il apprend lors d’une dispute familiale que son père était noir, et même s’il décide de continuer à dissimuler ses origines, sa vision du monde s’en trouve changée. C’est lors de la libération de son meilleur ami Aaron que le destin de Bobby bascule. Aaron sort de prison couvert de tatouages racistes et pétri de certitudes nauséabondes. Quand ce dernier agresse un jeune noir à la sortie d’un bar, Bobby se retrouve complice d’un meurtre.
Moins convaincant que Dernier appel pour les vivants de Peter Farris, avec des portraits moins fouillés que dans la série Oz, où les tensions raciales et la présence de membres de l’Aryan Brotherhood étaient particulièrement réalistes, Sangs mêlés aborde néanmoins les questions de l’identité et de la montée de l’extrême-droite aux Etats-Unis en évitant un propos trop manichéen. Le personnage d’Aaron est à ce titre particulièrement réussi, produit manifeste d’un système judiciaire qui transforme les victimes en bourreaux par le biais d’une répression stupide ne permettant aucune réhabilitation, aucune rédemption possible à ceux qui se sont écartés du droit chemin. Les esprits les plus faibles ont tôt fait de se faire embrigader par des meneurs aux idéaux rassurants de simplicité, quand l’Etat, l’école ou la police semblent se désintéresser de contrer, quand ils ne l’encouragent pas, un racisme endémique. Les conséquences, désastreuses pour une société de plus en plus divisée et violente, sont incarnées ici à travers la relation des deux amis, désormais incapables de communiquer, transformés en ennemis involontaires. L’on pourra trouver certaines ficelles un peu trop grosses, mais si l’on accepte de se laisser conter une histoire sensible aux allures de parabole, sangs mêlés remplit son rôle d’intelligent divertissement.
Marianne Peyronnet