Léo est vendeuse dans une boutique de prêt-à-porter pour femmes enceintes.

 

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Elle a une trentaine d’années et vit depuis dix ans avec son petit ami Simon qui bosse dans une start-up. Même si elle n’a jamais concrétisé son projet d’écriture de scénario après des études de cinéma, Léo est heureuse. Enfin, Léo était heureuse.

Ceux qui ont lu Débâcle, le premier roman de la belge Lize Spit, ne peuvent avoir oublié sa faculté à poser des mots justes pour décrire le malaise, l’effroi même, dans cette histoire terrible d’une enfance percutée. L’autrice poursuit ici, avec un talent renouvelé, son décorticage de la psychologie et des relations humaines. Le propos et la construction de son deuxième roman sont tout autre néanmoins. Quand Débâcle remontait le fil du temps pour révéler l’événement qui avait mené à l’effondrement de l’héroïne, Je ne suis pas là s’attache à examiner, au fur et à mesure de l’intrigue, les rapports qui unissent deux être amoureux jusqu’au moment de bascule, symbolisé par un coup de fil qui interrompt à intervalles réguliers le cours du récit et dont on se doute qu’il va délivrer un message terrible. Car de joyeuse, l’existence de Léo passe à déprimante, puis angoissante, tant le comportement de Simon change alors qu’il semble confronté à une forme de psychose s’installant progressivement dans son esprit et finissant par prendre toute la place dans le foyer.

Les premières années de vie commune du couple, tellement harmonieuses, où leur bonheur semblait tellement durable, s’effacent devant un quotidien fait de doutes, d’accusations, de perte de confiance. Simon plonge dans une parano aveuglante et Léo ne le reconnaît plus. La maladie les isole, les autres les fuient, elle se retrouve seule avec un inconnu.

L’histoire racontée dans Je ne suis pas là n’a rien d’inédit. C’est une histoire simplement triste. Si le roman est remarquable, c’est dans sa façon de livrer d’infimes détails qui sont, après coups, des preuves de désordre psychique. C’est dans son développement, lent, décrivant ces petits riens qui font un être, ces légères variations de comportement qui font qu’il est en train de devenir un autre, si ténues que le lecteur hésite longtemps à croire l’un ou l’autre des protagonistes. C’est dans sa description de l’enfermement virtuel dans lequel Simon se précipite, et dans lequel il entraîne comme s’il la noyait, celle qui fut sa moitié, et qui annonce un dénouement d’autant plus insupportable que leur amour était immense.

Marianne Peyronnet