A New York, un avocat raconte l’affaire dont il a la charge, à savoir un singulier trafic de livres rares, assortie du possible meurtre du possesseur desdits ouvrages.

 

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Anna Reddick, l’ex-femme dudit propriétaire lui a confié de résoudre l’enquête et l’avocat, en manque de finances suite à sa démission de la grande firme dans laquelle il s’épuisait, accepte, pensant se faire de l’argent facile. Les investigations vont vite se révéler plus ardues que prévues.

L’avocat, qui porte mystérieusement le même nom que son créateur, aurait pu être détective privé et le récit aurait pu se passer dans les années cinquante, avec gangsters et petites pépées, tant Nul Crépuscule n’est trop puissant puise dans les racines de la littérature de genre, au point d’accéder au rang d’admirable pastiche de roman noir. Si les images créées semblent tout droit sorties d’un film en noir et blanc, si l’on s’attend à croiser de belles carrosseries et des héroïnes en jupes crayon à chaque coin d’avenue, l’action se déroule bien néanmoins dans les années 2000. L’auteur prend un malin plaisir à brouiller les pistes. Son New York est si cliché qu’il paraît presque imaginaire, délicieusement désuet. Sûrement pour livrer un hommage appuyé à sa ville, une ville sur le point de disparaître. Alors, qui mieux qu’un dilettante pour prendre le temps d’observer les détails qui ne seront bientôt plus que des souvenirs ? Le personnage principal, plus qu’un défenseur de la veuve ou de l’orphelin prêt à tout pour arriver à clore son enquête quitte à risquer sa peau, s’avère un amoureux de la lenteur et le lecteur accompagne le mouvement, avec indolence.

S’accorder le luxe de passer quelques heures assis sur une chaise posée sur le trottoir à lire, aller voir un film en plein après-midi, discuter avec un ami de littérature au cours d’un repas interminable, quels bonheurs ! à l’opposé des courses poursuites des blockbusters ou de la vie supposée des habitants des mégalopoles. Ici, tout n’est que prétexte à la déambulation dans une cité chérie, quasi fantasmée : l’histoire et son dénouement, plutôt simples à suivre ; la figure de l’avocat libéré du poids de la rentabilité ; les multiples références littéraires et cinématographiques – Polanski, Melville, Wharton – … des prétextes à se poser, regarder les gens, penser à la vie qui passe.

Prendre le temps de déguster cette dernière publication des Editions du Gospel, avec sa couverture magnifique, magnifiquement traduite par Alex Ratcharge, (dont on avait beaucoup aimé le roman Raccourci vers nulle part, chez Tusitala) n’est pas perdre son temps.

Marianne Peyronnet