Qu’il soit plutôt France Inter, France Culture, France Musique ou France Bleu, chaque Français d’un certain âge entretient une histoire personnelle avec le service public de radiodiffusion française.
Mais qui sait vraiment de quoi Radio France est le nom et ce qui se cache entre les murs de la Maison Ronde ? Sise au 116 avenue du Président-Kennedy, dans le XVIe arrondissement, la Maison de la Radio est un univers en soi, presque une ville dans la ville dont la diversité n’a pas fini de surprendre le lecteur de ce reportage au cœur de l’une des institutions les plus aimées des Français. Dessinateur embarqué, Charlie Zanello s’est vu offrir l’accès à l’intégralité des services de Radio-France : de France Inter, bien sûr, dont l’audience battait alors des records historiques, à l’extraordinaire discothèque dont l’adresse précise, hors de la Maison de la radio, est encore tenue secrète pour des raisons de sécurité ; des orgues gigantesque du grand Auditorium – l’une des plus belles salles d’Europe – au Centre distributeur de modulations, centre névralgique de toute celle belle technicité. On en apprend de belles, donc, et aussi de moins belles : car Charlie Zanello débarque pile-poil au moment où le gouvernement lui ayant retiré 20 millions de budget, la direction croit bon de surenchérir de 40 millions. D’où l’une des plus longues grèves de Radio-France, de celle qui nous font prendre conscience pour de bon de ce qui nous manquerait si le service public de la radio venait à disparaître ou bien à être privatisé comme d’aucuns l’appellent de leurs vœux. Certes, tout n’est pas parfait dans cet album au demeurant copieux : ainsi le dessinateur passe-t-il complètement à côté de France Culture, vexé, semble-t-il, par un accueil mitigé qui le conduit à n’en donner qu’une piètre caricature. Il atteint alors ses limites autant qu’il les dénonce : loin de la finesse d’un Mathieu Sapin dans une approche assez voisine et désormais familière (cf sa récente Comédie française), Charlie Zanello reste l’un de ces soutiers sans grand génie de la BD, de ces auteurs moyens comme il s’en multiplie depuis qu’il n’y a plus moyen de la faire taire. Il n’en livre pas moins un ouvrage intéressant de par son sujet même, et qui offre un bon complément à La Maison de la Radio de Nicolas Philibert (2012), plus immersif, donc plus avare d’informations.
Yann Fastier