En Islande, une croyance populaire veut que les jours où le ciel et la terre se confondent en un même brouillard blanc,
les vivants et les morts peuvent communiquer. Nous sommes en Islande. Un vieil homme au nom imprononçable a récemment perdu sa femme dans un accident de voiture. Dépressif et mis en congé de la police locale, il en profite pour retaper une maison destinée à sa fille et, surtout, à sa petite fille de laquelle il est très proche. Bientôt, il en vient cependant à soupçonner une liaison entre sa défunte épouse et un homme du quartier. La jalousie s’installe, une jalousie posthume et délétère qui sera bien proche de lui faire commettre l’irréparable.
Hlynur Pálmason a une formation initiale de plasticien qui, peut-être pesait un peu trop Winter brothers, son film précédent, déjà voué au blanc. L’esthétique – très froide et contemporaine – y prenait parfois le pas sur le scénario, certes de belle manière mais peut-être un peu vaine. Plus « classique » en un sens, en tout cas plus cinématographiquement conforme, Un jour si blanc n’en reste pas moins attentif à ses cadres, composés comme de purs tableaux, et capable de belles échappées contemplatives, comme cette grosse pierre dévalant une longue, longue pente jusqu’à la mer où on la suit encore s’enfonçant dans les eaux jusqu’aux tréfonds, à l’image de la douleur insondable du vieil homme blessé dans son veuvage. Les symboles de cette sorte sont nombreux dans ce film. Ils pèsent cependant beaucoup moins qu’ils ne l’allègent de toute psychologie. L’Islande, après tout, offre des paysages assez spectaculaires pour se passer de bavardage. Ils parlent d’eux-mêmes, et bien mieux que les singeries psychothérapeutiques en ligne auxquelles le vieil ours se plie sans excessive bonne volonté. Et si traversée du tunnel il doit y avoir, elle aura lieu littéralement, dans un véritable tunnel, au terme d’une scène paroxystique qui le laisse ensanglanté, sa petite fille sur le dos comme une planche de salut, au son de la très belle et efficiente musique d’Edmund Finnis. On ne saurait mieux ne rien dire.
Yann Fastier