Félix et Alma se rencontrent un soir de fête à Paris et passent la nuit dans un parc.

 

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L’histoire aurait pu (dû) se terminer là. Garder le souvenir ému d’une rencontre, d’un amour sans lendemain. Mais voilà, Félix décide de suivre Alma sur son lieu de villégiature dans le sud, très loin des cités grises de la banlieue parisienne dont il ne s’échappe jamais. Il embarque son pote Chérif dans l’aventure, à la poursuite de sa belle, persuadé que la demoiselle sera heureuse de la surprise de son arrivée. Et comment se rendre à l’autre bout de la France quand on n’a pas de voiture et pas trop d’argent ? Ils louent les services de blablacar (en se faisant passer pour deux jeunes filles) et c’est Edouard qui récupère les deux copains.

Aussi frais que sont chaudes les journées d’été dans la Drôme, porté par des acteurs tout droit sortis du Conservatoire d’Art dramatique de Paris et dont cette expérience constitue pour la plupart leur première apparition au cinéma, A l’abordage est un fort joli film, émouvant comme le sont les premiers troubles amoureux. Brac prend le temps, semble poser sa caméra avec délicatesse et observer de loin les relations qui se tissent entre ses personnages. On imagine bien que cette faculté à s’effacer derrière ses acteurs n’est qu’une apparence. Le film est écrit, les dialogues ciselés. Les plans, souvent composés de plans-séquences, d’une longueur qui accentue la nonchalance des estivants, la langueur des journées passées au bord de l’eau, s’enchaînent sans temps morts et l’on ne s’ennuie jamais, et si l’intrigue n’est pas l’essentiel l’inattendu est au bout de l’allée. Un regard, une caresse, une repartie cinglante suffisent à susciter l’intérêt. Les protagonistes, bien définis, prennent de la profondeur à mesure qu’ils interagissent avec leurs partenaires, qu’ils n’auraient jamais dû fréquenter, au cours de discussions au café, de nuits passées en commun sous la tente, de rencontres fortuites à la plage. Aucun heurt ici, entre ces jeunes venus du nord de Paris et les estivants, sinon de peu d’importance. Tout est fluide, rien n’est grave, même pas les engueulades entre les potes qu’on devine de courte durée. Le moment, cet instant de lâcher prise dû aux vacances, permet les relations apaisées, et le réalisateur évite de donner des leçons, en ne sombrant jamais dans le mielleux, la bien-pensance. Cette impression est renforcée par la couleur du film. La lumière est superbe, rasante, rarement écrasante, rendant hommage aux décors naturels dans lesquels le film s’immerge. Gracieux.

Marianne Peyronnet